La vénerie est une pratique ancestrale de chasse à courre qui perdure en France avec 390 équipages et 10 000 pratiquants dans 69 départements. Cette pratique cynégétique encadrée perpétue des traditions séculaires tout en s'adaptant aux enjeux contemporains de gestion de la faune sauvage et de protection de la biodiversité.
Histoire et traditions de la vénerie française
La vénerie française, art ancestral de la chasse à courre, constitue un patrimoine cynégétique riche qui perdure depuis le Moyen Âge. Cette pratique traditionnelle, codifiée par des règles strictes, mobilise aujourd'hui plusieurs milliers de passionnés sur le territoire national.
Des origines médiévales à la codification royale
La vénerie prend ses racines au XIIe siècle, période où les nobles français développent la chasse au cerf avec des meutes de chiens. Sous Louis XI (1461-1483), la pratique connaît un essor majeur. Le roi, surnommé "le père des veneurs", promulgue en 1464 un édit qui établit la police de la chasse et réglemente la grande vénerie. Ce texte fondateur pose les principes toujours en vigueur : autonomie de la meute et poursuite d'un seul gibier.
Organisation actuelle
La Société de Vénerie, créée en 1907 et basée à Paris, fédère aujourd'hui l'ensemble des équipages français. Les chiffres 2024 témoignent de la vitalité de cette pratique :
- 390 équipages répartis dans 69 départements
- 10 000 pratiquants actifs
- 100 000 suiveurs et sympathisants
- 20 000 chiens de meute
Codes et traditions
La vénerie française maintient des usages séculaires très codifiés. Les veneurs portent la tenue traditionnelle : redingote bleue, culotte blanche, bottes noires. Les trompes de chasse, inscrites au patrimoine culturel immatériel de l'UNESCO depuis 2015, rythment les différentes phases de la chasse par des fanfares spécifiques.
Un vocabulaire particulier
Le langage de la vénerie emploie un vocabulaire technique précis : les traces sont des "foulées", l'animal chassé laisse une "voie", le cerf "perce" quand il fuit. Ces termes transmis depuis des siècles permettent une communication efficace entre veneurs.
Formation et transmission
La formation des nouveaux veneurs s'effectue sur le terrain, auprès des équipages existants. L'École Française de Vénerie dispense également des formations théoriques et pratiques pour perpétuer les savoirs cynégétiques traditionnels.
Les techniques et méthodes de la chasse à courre
La vénerie française repose sur des techniques et méthodes précises, transmises de génération en génération. Cette pratique cynégétique mobilise des savoir-faire ancestraux autour du pistage et du travail des chiens courants.
Organisation d'une journée de chasse
La journée débute par le rapport du valet de limier qui a "fait le bois" tôt le matin pour localiser l'animal à chasser. Les chiens sont ensuite découplés sur la voie de l'animal. La meute, composée de 20 à 100 chiens selon le gibier chassé, est encadrée par les veneurs à pied ou à cheval. Les races utilisées sont principalement le Poitevin, l'Anglo-français tricolore et le Français blanc et noir pour la grande vénerie, le Beagle, le Basset artésien normand et le Petit gascon saintongeois pour la petite vénerie.
Types de vénerie et techniques de chasse
La grande vénerie se pratique à cheval pour la poursuite des grands animaux (cerf, chevreuil, sanglier). La petite vénerie se déroule à pied pour le petit gibier (lièvre, lapin, renard). Les veneurs suivent les "brisées" - branches cassées marquant le passage de l'animal - et interprètent les indices laissés au sol. Le "change", consistant à changer d'animal en cours de chasse, est strictement interdit.
Vocabulaire et codes de la chasse
Les sonneries de trompe rythment la chasse : "la vue" signale l'animal aperçu, "le bien-aller" indique que les chiens sont sur la bonne voie, "l'hallali" annonce la fin de chasse. La "curée" est le rituel final où les chiens reçoivent leur récompense. Ces codes stricts visent à respecter l'animal chassé.
Éthique et respect de l'animal
La vénerie obéit à des règles éthiques strictes : un seul animal est chassé à la fois, les chiens doivent être parfaitement créancés sur leur voie. L'animal doit avoir toutes ses chances - statistiquement, 75% des animaux chassés échappent à la meute. La chasse est arrêtée si l'animal est blessé ou épuisé. Les veneurs sont tenus de respecter le territoire et les cultures.
Formation et transmission des savoirs
Les piqueurs, responsables des meutes, forment les jeunes chiens pendant deux ans avant leur entrée en chasse. Les boutons (veneurs confirmés) transmettent leurs connaissances aux nouveaux pratiquants sur le terrain. Cette formation continue permet de perpétuer les techniques ancestrales tout en les adaptant aux contraintes actuelles.
Les espèces chassées et leurs territoires
La vénerie française cible différentes espèces de grand et petit gibier, avec des prélèvements annuels maîtrisés qui s'élèvent à environ 3 800 animaux pour 13 000 journées de chasse. Les territoires de chasse s'étendent sur plus de 6 millions d'hectares, principalement en forêts domaniales et propriétés privées.
Les animaux chassés en vénerie
Le cerf élaphe constitue le gibier noble par excellence de la grande vénerie. Doté d'une endurance remarquable, il peut parcourir plusieurs dizaines de kilomètres lors d'une chasse. Le sanglier, animal puissant et rusé, met souvent la meute en difficulté par ses changements brusques de direction. Le chevreuil, plus petit cervidé, se caractérise par des ruses complexes comme le hourvari (retour sur ses pas) pour dérouter les chiens.
En petite vénerie, le renard utilise fréquemment la technique du "bat l'eau" en traversant ruisseaux et étangs pour masquer ses traces. Le lièvre, malgré sa taille modeste, démontre une intelligence tactique en multipliant les crochets et en pratiquant le "forlonger" (prendre de l'avance sur les chiens).
Répartition territoriale de la vénerie
Type de territoire | Surface (ha) | Proportion (%) |
Forêts domaniales | 1 800 000 | 30% |
Propriétés privées | 3 600 000 | 60% |
Autres (communales...) | 600 000 | 10% |
Les ruses naturelles du gibier
Les animaux chassés développent des stratégies d'évitement sophistiquées. Le "change" consiste à pousser un congénère à prendre sa place face aux chiens. Le "forlonger" permet de distancer la meute en accélérant brusquement. Le "hourvari" désoriente les chiens par des demi-tours successifs. Ces comportements naturels démontrent les capacités d'adaptation du gibier.
Statistiques des prises annuelles
- Cerfs : 850 prises
- Sangliers : 1 200 prises
- Chevreuils : 750 prises
- Renards : 600 prises
- Lièvres : 400 prises
Les enjeux contemporains de la vénerie
La vénerie française fait face aujourd'hui à de nombreux défis qui questionnent sa pérennité, tout en conservant un patrimoine culturel et des savoir-faire traditionnels reconnus.
Une pratique encadrée et contestée
L'arrêté ministériel du 18 mars 2019 définit strictement les conditions d'exercice de la vénerie en France. Les 390 équipages doivent respecter des périodes de chasse définies, des zones autorisées et des quotas de prélèvement. Les manifestations anti-vénerie se multiplient depuis 2017, conduisant parfois à l'interruption des chasses. En réponse, la Société de Vénerie a adopté une charte éthique engageant les veneurs au respect du bien-être animal et de l'environnement.
Un patrimoine culturel vivant
Trois grands musées conservent et valorisent l'histoire et les traditions de la vénerie française : le musée de la Vénerie à Senlis, le musée de la Chasse à Chantilly et le musée d'Art et d'Histoire de la Chasse à Fontainebleau. Les fêtes de la chasse organisées par les équipages attirent plus d'un million de visiteurs annuels. Les artisans perpétuent les savoir-faire traditionnels : selliers, bottiers, équipementiers, facteurs de trompes.
La gestion cynégétique
Les équipages participent à la régulation des populations de grand gibier en forêt. Sur la saison 2023-2024, les prélèvements se répartissent ainsi :
- 1 450 cerfs
- 850 sangliers
- 650 chevreuils
- 850 autres espèces (renards, lièvres)
Formation et transmission
La vénerie française forme chaque année de nouveaux veneurs aux techniques traditionnelles : connaissance des animaux, travail des chiens, maniement de la trompe. Les boutons, distinctions remises aux veneurs confirmés, sanctionnent cette transmission des savoirs. En 2024, 10 000 pratiquants actifs perpétuent cet art cynégétique séculaire.
"La vénerie doit démontrer sa capacité à s'adapter aux attentes sociétales sans renier son essence" Président de la Société de Vénerie, janvier 2025
L'essentiel à retenir sur la vénerie française
La vénerie française évolue entre traditions et modernité. Elle doit composer avec des réglementations plus strictes et une sensibilité sociétale accrue au bien-être animal. Son avenir dépendra de sa capacité à démontrer son utilité dans la régulation des populations de gibier tout en préservant un patrimoine culturel et des savoir-faire ancestraux.
Questions en rapport avec le sujet
Qu'est-ce que la vènerie sous terre ?
Le principe de la vènerie sous terre, aussi appelée déterrage, est de chasser le blaireau ou le renard dans les galeries qu'ils creusent dans le sol. Pour ce faire, une meute de chiens de chasse est indispensable afin de repérer et poursuivre la voie de l'animal.
Quel est le nom du chien courant utilisé en chasse à courre ?
Le Beagle. Le Beagle est un chien courant souvent utilisé pour la chasse à courre. Originaire de Grande-Bretagne, il est très populaire en France et il est souvent adopté comme animal de compagnie.
Comment se termine une chasse à courre ?
La chasse à courre est un mode de chasse ancestral par lequel un animal sauvage (cerf dans la majorité des cas) est poursuivi par un équipage constitué de veneurs à cheval et d'une meute de chiens courants, jusqu'à son épuisement et sa prise. Dès lors, l'animal est achevé à l'arme blanche et donné aux chiens.